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Christophe Moreau

Sociologue à JEUDEVI, chercheur associé au LAS, Université Européenne de Bretagne. christophe.moreau chez univ-rennes2.fr

Sociologies de la post modernité et théorie de la personne


Nous proposons, dans cet article, d’exploiter les concepts de la théorie de la personne pour aborder la notion de « société réflexive », et nourrir un dialogue avec quelques théories sociologiques contemporaines qui analysent notre époque, qualifiée par certains de « post moderne ». Il en ressort que ces analyses en restent, le plus souvent, à une opposition entre l’individuel et le collectif (ou le social) et apparaissent à ce titre éloignées de la catégorie de personne, qui permet justement de penser la dialectique entre ego et autrui, et de poser le lien contradictoire entre le singulier et l’universel comme constitutif de la capacité sociale de l’humain.

Nous parcourrons donc quelques approches sociologiques contemporaines, que nous avons ordonnées sommairement sous forme de trois tendances générales, avant de revenir au débat qui nourrit la rencontre entre Marcel Gauchet et Jean Gagnepain [1]. Nous suggérerons alors quelques perspectives afin de prolonger la critique de Marcel Gauchet qui cherche à articuler l’entrée par l’être soi (« capacité de société ») et l’entrée par l’être ensemble (« ce qui permet à une société d’exister, de posséder sa cohérence propre, de disposer d’une identité en tant, que telle » [2]).

Il existe actuellement une convergence de points de vue en sciences sociales qui attestent d’une montée de la société réflexive, ou d’une montée de l’individu : grande indépendance à l’égard des traditions, moindre influence des organisations religieuses, étatiques, politiques, industrielles ou familiales, montée en puissance apparente du choix individuel pour se construire une trajectoire et des comportements sociaux. Le philosophe Marcel Gauchet avait, de longue date, entrepris une vaste réflexion autour de l’histoire du sujet, qu’il construit à travers les notions de personne, individu, sujet, et personnalité : reconnaissance de la personne par la philosophie scholastique dans la seconde moitié du XIIIe siècle (Saint Thomas d’Aquin), construction de l’individu de droit au sein du droit naturel moderne du XVIIe et XVIIIe siècle, avènement du sujet des philosophes et de la subjectivité comme caractère de la modernité entre 1780 et 1810, découverte de la personnalité par la psychologie et la psychanalyse autour de 1900. Ce parcours extraordinaire serait dû, pour ce philosophe, à la coalescence des deux aspects d’un même phénomène humain-social, à la rencontre entre un invariant anthropologique (l’institution de la personne comme sens de la singularité individuelle et comme responsabilité vis-à-vis d’autrui) et un contexte historique occidental de sortie de la religion, qui se distingue par trois traits principaux : une forme politique d’État-nation, un droit de type nouveau (droits de l’Homme), une orientation historique au sens d’historicité consciente. Et en ce sens, pour le philosophe, si la théorie de la médiation permet d’élaborer la catégorie de personne en tant qu’invariant anthropologique, elle ne permet pas de saisir ou de rendre compte du phénomène social, historique, politique qui a donné lieu à cette nouvelle forme d’être ensemble.

Pour examiner les travaux de quelques sociologues contemporains qui traitent de cette évolution, nous les avons classés schématiquement en trois grandes thèses : des auteurs voient la montée de l’individu comme une libération, une victoire sur les institutions qu’étaient d’abord historiquement la religion, puis la famille (de Singly, Kaufmann) ou encore l’organisation du travail industriel (Giddens) pour expliquer la prise de distance assumée par l’homme pluriel (Lahire). Une seconde approche porte un regard plus tragique sur les souffrances et la fatigue de l’individu (Erhenberg), désormais plongé dans cette ère du vide (Lipovetsky). Une troisième approche, sous un angle fort différent, se pencherait sur le déficit de cadres collectifs et « l’individu par défaut » (Castel), l’affaiblissement des institutions (Dubet), la désindividuation (Maffesoli). Nous présentons succinctement les idées centrales de ces différentes approches afin d’introduire dans ce débat quelques concepts issus de la théorie de la médiation.

I — La montée de l’individu démocratique comme une libération

On peut ranger ici les travaux de Anthony Giddens qui intéressent nombre de commentateurs français, ou encore ceux d’Ulrich Beck, et plus près de nous par exemple Jean-Claude Kaufmann. Ces auteurs, bien qu’ils soient plus ou moins prudents sur la notion de « rupture » ou de « révolution » historique, situent dans la période de l’après-guerre, ou plus précisément à partir des années soixante, l’émergence de stratégies individuelles sur le plan matrimonial (baisse du nombre de mariages et progression du divorce, augmentation de la monoparentalité), ou résidentiel (diminution constante du nombre moyen de personnes par ménage, progression du nombre de ménages d’une personne…). Sur le plan des pratiques sociales, on évoque selon les auteurs la progression des stratégies individuelles, la mobilité sociale où les rôles ne sont plus prescrits mais à acquérir, l’émancipation de la femme, l’émergence de pratiques culturelles juvéniles spécifiques etc. François de Singly s’intéresse notamment à la condition féminine et voit dans l’évolution de nos démocraties la progression d’un « individualisme émancipateur » qui se manifeste par le « refus de tout enfermement identitaire involontaire » [3]. Il montre que cet individualisme émancipateur n’est pas contradictoire avec le renforcement du lien social et avec l’action collective « l’idéal de l’individualisme ne s’éloigne pas du social. Il en dessine au contraire les contours qui sont ceux de la démocratie ». On note au passage le dualisme supposé entre individu et société, que l’on retrouvera fréquemment au cours de ces lectures.

Kaufmann, parmi d‘autres, évoque l’individu comme un processus historique qui aurait vu émerger « l’invention de soi » au cœur même de l’identité individuelle depuis moins d’un demi-siècle [4]. Et si l’« individu démocratique » est devenu maître de sa vie, c’est notamment par la réflexivité, c’est-à-dire sa capacité à être en regard de soi-même, à s’analyser, à opérer des choix et à prendre des décisions, dans tous les domaines de la vie publique et privée.

C’est sur cette notion de réflexivité que Giddens, sociologue anglais (également proche conseiller de Anthony Blair lorsque celui-ci était Premier ministre du Royaume-Uni [5]) développe ses travaux sur la modernité : il en souligne l’importance pour comprendre comment la société, via les informations et les sciences sociales, se connaît de mieux en mieux elle-même. Cette seconde modernité (la seule véritable modernité selon lui) verrait l’avènement d’une société véritablement affranchie des traditions, qu’elles soient religieuses, familiales, communautaires ou industrielles. L’individu, libéré des traditions, se verrait aujourd’hui contraint d’être libre, et donc de devoir en permanence analyser sa situation et son action, mesurer ses choix pour prendre les bonnes décisions, dans une société qui (se) connaît de plus en plus. La réflexivité serait définie comme « l’examen et la révision constants des pratiques sociales, à la lumière des informations nouvelles concernant ces pratiques mêmes, ce qui altère ainsi constitutivement leur caractère » [6]. Non que les humains n’aient pas, auparavant, réfléchi à leur propre condition, mais la réflexivité se renforcerait à mesure que les contraintes qui pesaient sur les rôles sociaux et les normes de conduite s’affaibliraient. Nous verrons plus loin que cette approche de la réflexivité englobe différents plans de rationalité qui ont, pour la théorie de la médiation, une autonomie de fonctionnement : le plan logique (la connaissance sur soi, la société de l’information), le plan social (invention de soi, analyse de sa situation) et le plan éthique (choix, décision, expression de la liberté).

Dans un autre registre, Ulrich Beck [7] analyse l’incertitude dans les situations humaines aujourd’hui, en se référant à la notion de risque, qu’il décline pour analyser tant les risques technologiques que la flexi­bilité économique et l’individualisation des pratiques. L’organisation sociale, auparavant organisée autour de la répartition des richesses, le serait désormais autour de la répartition des risques. Le processus d’individualisation signifie à la fois la décomposition, et l’abandon des modes de vie de la société industrielle fondés sur les classes sociales, les rôles sexués, l’organisation familiale etc., pour faire place à une construction individuelle des trajectoires personnelles. L’individualisation apparaît comme « une contrainte, il est vrai paradoxale, à la réalisation de soi ». Dans l’ère de l’incertitude, les notions de risque et de réflexi­vité seraient devenues les clefs d’explication de nos organisations sociales de plus en plus insaisissables ; ces deux dernières approches restent malheureusement très conceptuelles et fort éloignées du souci de vérification empirique inhérente à la recherche en sciences humaines [8].

Enfin, citons Bernard Lahire, qui s’intéresse à « l’homme pluriel » [9] : c’en est désormais fini de l’individu façonné tout d’un bloc sur le même modèle, tel cet artisan ébéniste cité par Pierre Bourdieu qui serait tout entier marqué par l’éthique de son métier, de ses gestes au travail à sa tenue vestimentaire ou à la gestion de son budget et de son logement. Les acteurs incorporent aujourd’hui des modèles d’action différents et contradictoires, au cours de leur vie, ou bien même simultanément en fonction des contextes. Lahire fait donc l’hypothèse que les acteurs incorporent une pluralité de modèles de socialisation et de schèmes d’action, qui seraient stockés et activés en fonction des situations. Il se porte en faux à l’égard d’une grande partie des chercheurs qui présupposent toujours, malgré la multiplicité des expériences vécues et des rôles intériorisés, un soi cohérent et unifié, une unité fondamentale. Pour lui, l’individu singulier, résultat de multiples expériences et apprentissages, est nécessairement pluriel. Et cet homme pluriel est aujourd’hui la règle plutôt que l’exception, du fait d’une disjonction entre les différentes sphères d’activité que sont notamment la famille, l’école, l’activité économique, religieuse, cognitive. L’auteur prône une sociologie à l’échelle de l’individu ou sociologie psychologique, pour lier le plus finement possible le psychisme individuel aux cadres de la vie sociale.

II — Les souffrances de l’individu contemporain

En contre-point de cet individu démocratique et libéré des contraintes traditionnelles, d’autres chercheurs font état du désarroi, de la souffrance, de la « fatigue d’être soi » de nos contemporains. Les analyses d’Alain Erhenberg notamment se sont largement diffusées en France : « l’individu incertain » d’aujourd’hui porte comme un fardeau psychique l’obligation d’être autonome, tiraillé par la contradiction entre la responsabilité individuelle accrue, d’une part, et une exclusion sociale croissante d’autre part. Dans le même temps se développe une sensibilité à toutes les souffrances sociales, psychiques, ou physiques. L’individu, sommé d’être libre, est pris dans une tension entre la néces­sité d’être soi et la difficulté à l’être. La conséquence de l’avènement de cette nouvelle forme sociale (l’individualisme) se trouve notamment dans le développement de la maladie mentale et de la dépression dans les sociétés occidentales. Il définit la dépression comme un trouble de la responsabilité à un moment « où le modèle disciplinaire des gestions des conduites, les règles d’autorité et de conformité aux interdits, qui assignaient aux classes sociales comme aux deux sexes un destin, ont cédé devant des normes qui incitent chacun à l’initiative individuelle [10] ». La frontière se brouille, la vie privée se modèle sur la vie publique : « un espace où l’on communique pour négocier et aboutir à des compromis au lieu de commander et d’obéir ». L’individualisme contemporain est le produit de deux mutations parallèles : la privatisation de la vie publique et la publicisation de la vie privée.

On perçoit ici une préoccupation pour les affects, les comportements et la relation aux interdits, qui se trouve associée à une réflexion sur le déficit de contrat et l’accentuation de la responsabilité individuelle. Comme souvent, la recherche en sciences humaines s’intéresse aux phénomènes historiques, positifs, observables, alors que le modèle de la médiation nous incite à dissocier les phénomènes des processus impli­cites qui les expliquent et, dans ce cadre, à dissocier ce qui relève de la personne ou de la société et ce qui relève de l’axiologie, entendue comme capacité à réglementer nos désirs. Il est toutefois vrai que les interactions entre les plans de la personne et de la norme, au pôle per­formantiel, mériteraient d’être étudiées par les chercheurs qui développent le modèle de la médiation.

D’autre part, Erhenberg s’intéresse à la fin des transcendances (Dieu, le progrès), qui impose à l’individu de devenir, dans l’incertitude, sa propre transcendance. Nous sommes donc sommés d’être responsables de nous-mêmes à un point jamais atteint dans l’histoire humaine. Cette augmentation de responsabilité nous rendrait plus vulnérables. Pour alléger ce poids et faciliter la capacité d’agir, nos sociétés offriraient donc toutes sortes de possibilités que l’auteur regroupe en deux catégo­ries : les moyens d’action sur soi de la pharmacologie (drogues illicites, anxiolytiques, antidépresseurs) et les mises en scène de soi par les technologies de la communication (interactivité, reality-shows, cyberespace). L’hypothèse centrale d’Ehrenberg est que « la généralisa­tion de la recherche de sensations et le basculement de la télévision dans le terminal relationnel sont symptomatiques des troubles de la distance et de la confusion du public et du privé ». « Quel que soit le domaine envisagé (entreprise, école, famille), écrit-il, le monde a changé de règles. Elles ne sont plus obéissance, discipline, conformité à la morale, mais flexibilité, changement, rapidité de réaction, etc. Maîtrise de soi, souplesse psychique et affective, capacités d’action font que chacun doit endurer la charge de s’adapter en permanence à un monde qui perd précisément sa permanence, un monde instable, provisoire, fait de flux et de trajectoires en dents de scie ». Être propriétaire de soi ne signifie pas que tout est possible. La fatigue dépressive a remplacé l’angoisse névrotique. « La dépression et l’addiction sont les noms donnés à l’im­maîtrisable quand il ne s’agit plus de conquérir sa liberté, mais de devenir soi et de prendre l’initiative d’agir ». « À l’implosion dépressive répond l’explosion addictive, au manque de sensation du déprimé répond la recherche de sensations du drogué ». Dépression et addiction seraient donc, pour cet auteur, des pathologies de la responsabilité. C’est le temps de la toxicomanie et de la dépression, où l’impossible vient du corps pour faire limite et témoignage, dessinant l’horizon d’un narcis­sisme postmoderne qui est celui d’un individu par excès.

Dans un registre différent, les travaux de Gilles Lipovetsky [11] ont également fait date pour dépeindre le procès de « personnalisation » et la perte de sens de nos sociétés dites post modernes. Dès le début des années 90, l’auteur critique la tendance hyper hédoniste à l’œuvre dans l’histoire contemporaine : s’appuyant sur les travaux de Daniel Bell [12], il montre que l’hédonisme est devenu le principe axial de la culture moderne, où sont valorisés avant tout l’accomplissement du moi, la jouissance, la spontanéité. Ce principe de l’hédonisme serait en totale contradiction avec les logiques qui président aux autres sphères de l’existence : la rationalité fonctionnelle dans l’ordre techno-économique, et le principe de l’égalité dans l’ordre du politique.

L’hédonisme, qui était au début du siècle l’apanage d’un nombre réduit d’artistes antibourgeois est devenu, porté par la consommation de masse, la valeur centrale de notre culture. L’avènement du post-modernisme implique que l’avant-garde ne suscite plus d’indignation, que le plaisir et la stimulation de sens deviennent les valeurs dominantes de la vie courante. En ce sens, le post-modernisme apparaît comme la démocratisation de l’hédonisme, la consécration généralisée du nouveau, le triomphe de « l’anti-morale et de l’anti-institutionnalisme », la fin du divorce entre les valeurs de la sphère artistique et celles du quotidien.

Cette culture extrémiste pousserait la logique du modernisme jusqu’à ses plus extrêmes limites : radicalisme culturel et politique, hédonisme exacerbé qui se manifestent par la révolte étudiante, la contre-culture, la vogue de la marijuana et du LSD, la libération sexuelle, les films et publications porno-pop, la surenchère de violence et de cruauté dans les spectacles. Cette évolution culturelle se résume à une extension de l’hédonisme et à la démocratisation du libertinage. Admettre que l’hédo­nisme et la consommation sont l’épicentre du modernisme et du post-modernisme, c’est aussi en percevoir les conséquences : en absorbant l’individu dans la course au niveau de vie, en légitimant la recherche de l’accomplissement de soi, en l’assaillant d’images, d’informations, de culture, la société du bien-être a généré une atomisation ou une désocia­lisation radicale, sans commune mesure avec celle mise en œuvre par la scolarisation obligatoire, la conscription, l’urbanisation et l’industrialisa­tion du XIXe siècle.

Avec l’univers des objets, de la publicité, des médias, la vie quotidienne et l’individu n’ont plus de pesanteur propre, annexés qu’ils sont par le procès de la mode et de l’obsolescence accélérée. L’ère de la consommation s’inscrit dans le vaste dispositif moderne de l’émancipation de l’individu d’une part, de la régulation totale et microscopique du social d’autre part, qui impliquent la constitution d’une sphère privée de plus en plus personnalisée et indépendante. Car si l’on assiste à l’uniformisation des comportements avec la consommation de masse, on découvre corrélativement l’accentuation des singularités, la personnalisation sans précédent des individus. L’offre multiple et diversifiée exaspère le désir d’être soi-même à part entière, et pour être vraiment soi-même et différent des autres le sujet a recours à une excentricité criante, une originalité sans limites. Cette évolution tend à réduire les différences anthropologiques entre les sexes et les générations au bénéfice d’une hyperdifférenciation des comportements individuels : crise des générations, révolte des femmes, culture rock, pop, le drame des troisième et quatrième âges ; il nous faut penser notre temps sous le signe de l’exclusion, du fossé tranché entre les groupes, tandis que masculin et féminin se brouillent, perdent leurs caractéristiques tranchées d’autrefois.

Le procès de personnalisation a permis ce desserrement « cool » des repères sociaux, la légitimation de tous les modes de vie, la conquête de l’identité personnelle, le droit d’être absolument soi-même, l’appétit de personnalité jusqu’à son terme narcissique. Devant la pléthore des modèles, l’individu est contraint à un choix permanent, il doit s’informer, critiquer, s’ausculter et se tester.

Mais l’auteur identifie une contradiction dans la logique individualiste : on voit s’accélérer les formes d’autocontrôle autant que l’approfondissement de la marginalisation sociale. Les démocraties génèrent plus de normalisation et plus d’exclusion, plus d’auto-surveillance hygiéniste et plus de « défonce » toxicomaniaque, plus de répulsion envers la délinquance et plus de délinquance dans les ghettos, plus de désir et de confort, et plus de sans-abri, plus d’amour des enfants et plus de familles sans père. Cette dichotomie est essentielle dans la théorie de Lipovetsky : d’un côté l’individualisme hédoniste apporte un travail d’autocontrôle et d’autosurveillance permanente, et d’un autre côté il annihile le sens du travail et de l’effort, il réprouve les instances de contrôle social et mène à la désocialisation et à la criminalisation. Une majorité est intégrée et responsable, et les nouvelles minorités de « paumés » et de délinquants sont sans avenir et irresponsables. La culture sacrificielle est morte, nous avons cessé de nous reconnaître dans l’obligation de vivre pour autre chose que nous-mêmes [13].

III — L’individu par défaut et la désindividuation

D’autres chercheurs porteront la focale sur la fragmentation, ou la dissolution des cadres collectifs qui assuraient le maintien de nos solidarités et de notre organisation sociale, entraînant cette nouvelle forme d’individu : l’individu par défaut pour Robert Castel, induit par l’éclatement structurel des identités subjectives (Freitag), ou le déclin des institutions (Dubet) ; dans un tout autre registre, Maffesoli évoque un processus de désindividuation.

Castel analyse l’histoire de la société salariale et son effritement progressif lié à un capitalisme plus agressif, plus concurrentiel, mondialisé ; cette évolution a de l’incidence sur le statut de l’individu qui devient un « individu par défaut », qui ne dispose pas du minimum de ressources, de supports, de droits pour construire son existence sociale avec un minimum d’indépendance. Alors que l’histoire de luttes sociales avait conduit à constituer pour chaque « travailleur » une forme de « propriété sociale » entendue comme l’ensemble des ressources et des droits attachés au travail (sécurité sociale, droit du travail, assurance chômage, assurance maladie, droit à la retraite…), Castel dénonce le processus actuel de décollectivisation, de mise en mobilité et de réindividuation dans l’organisation du travail qui fait appel à de nouveaux impératifs : responsabilité, autonomie, initiative, nécessité de conduire sa carrière… Il conclut son histoire passionnante de la société salariale [14] par l’avènement d’un « individualisme négatif » qui serait le fruit non pas d’un excès d’individualisme mais plutôt d’un déficit de cadres collectifs de protection et d’engagement sociaux. Individualisme négatif, car il se décline en termes de manques : manque de considération, de sécurité, de liens stables. À la fin du XVIIIe siècle, l’individualisme « positif » s’impose en essayant de recomposer la société sur la base du contrat. Cette nouvelle règle du jeu aura pour effet de détruire ce qui restait d’appartenances collectives et de solidarités de proximité. Castel note également une modification du rapport au temps : la remontée de l’insécurité sociale, c’est aussi le retour de l’immédiateté et de la vie « au jour la journée ».

On peut ranger dans ce cadre les travaux de Michel Freitag [15], qui analyse les modes de reproduction de la société dans leur évolution historique, depuis le mode culturel-symbolique au mode politico-institutionnel puis enfin au mode décisionnel-opérationnel qui caractériserait selon lui la société post-moderne, basée sur la cybernétique, le règne de l’information et l’éparpillement des pôles de décision et des rapports de forces. Si l’on constate avec Freitag l’avènement d’un type d’individualisme, celui-ci est engendré par l’évolution structurelle de la société, et ne se définit pas par un excès de revendications et d’investissements subjectifs, mais par un défaut de cadres. Face à l’émiettement des pôles de décision et des rapports de force, notre société aurait perdu un système de significations commun à tous, les individus se trouveraient atomisés, isolés, et les identités singulières effacées ou refoulées dans la sphère du privé. Désormais les pratiques sociales échappent à tout principe d’unité et à toute valeur normative transcendantes, elles ne renvoient plus qu’à une multitude de subjectivités individuelles et collectives partielles et circonstancielles. On assisterait à un éclatement structurel des identités subjectives.

François Dubet [16] entre dans ce débat par la sociologie de l’expérience : il constate, notamment dans ses recherches auprès de jeunes adultes, un éclatement des conduites et des propos des acteurs, qui adoptent tour à tour des positions et des points de vue différents. Au processus de socialisation à travers des rôles et des statuts imposés par dans un « programme institutionnel », se substituerait aujourd’hui une nécessaire construction de soi par l’expérience. La formation de la personnalité ne se construisant plus par l’intégration d’habitus, l’adhésion à des normes et à des rôles, il appartient à chacun de prendre de la distance face à soi, à travers des expériences parfois contradictoires. « La simple adhésion culturelle et sociale aux valeurs de l’école s’efface devant des mécanismes de formation de la réflexivité, de la distance à soi, de la critique ». Ces nouvelles formes de socialisation procéderaient d’une « évolution lourde, à savoir le déclin de l’idée de société conçue comme un ensemble organisé, celui de l’État-nation » [17] ; dans ce sens l’école ne serait plus une institution. D’un point de vue structurel, ce serait la conséquence d’une autonomisation de la culture, de l’économie et de la vie politique qui ne formeraient plus un système organisé. L’absence d’unité et de cohérence entre ces différents sous-systèmes conduirait l’individu à reconstruire, en son for intérieur, une unité qu’il ne trouve plus ou de moins en moins dans la société, comprise ici comme le cadre « objectif » de son expérience sociale.

Michel Maffesoli, dans un autre style et sur un autre registre, s’intéresse à la dynamique émotionnelle pour expliquer le processus de désindividuation qui serait à l’œuvre dans la post modernité. Il oppose à la période moderne abstractive et rationnelle, la période « empathique », mettant ainsi l’accent sur les communautés émotionnelles. Leurs principales caractéristiques seraient leur aspect éphémère, leur composition changeante et désorganisée, leur inscription dans l’espace local, leur existence non pas pro, ou contra, mais délibérément à côté. Elles consisteraient en un mixte d’indifférence et d’énergie ponctuelle ; on y trouve un dédain pour toute attitude projective, accompagné d’une intensité dans l’acte. C’est à dire qu’elles se caractérisent moins par la projection dans l’avenir que par l’effectuation in actu de la pulsion à être ensemble. Dans la lecture historique de Maffesoli, il existerait une sensibilité collective pouvant spécifier telle ou telle époque : « l’aura » théologique au Moyen Age, « l’aura » politique au XVIIIe siècle, « l’aura » progressiste au XIXe siècle... Il décèle aujourd’hui une « aura » esthétique, caractérisée par la pulsion communautaire, la propension mythique et la perspective écologiste.

Ce qu’il nomme l’émotion, ou la sensibilité, ne se rapporterait pas uniquement au ressenti individuel, aux perceptions de chacun, mais constituerait un mélange d’objectivité et de subjectivité qui cimenterait l’ensemble. Le sentiment esthétique n’apparaît nullement comme une expérience individualiste ou intérieure mais plutôt comme une ouverture aux autres et à l’Autre, cette ouverture connotant le local et la proxémie.

De nombreux phénomènes contemporains — le conformisme des jeunes générations, la passion de la ressemblance dans les groupes ou tribus, les phénomènes de mode, la culture standardisée, l’unisexualisa­tion de l’apparence — permettraient de dire que s’opère la déperdition de l’idée d’individu, au profit des masses indistinctes et du « néo-tribalisme ». La masse se suffit à elle-même, ne se projette pas, ne se finalise pas, ne se politise pas, elle vit le tourbillon de ses affects et de ses expériences multiples, et serait cause et effet de la déperdition du sujet. Elle est dite dionysiaque et confusionnelle.

IV — Assistons-nous à une mutation anthropologique ?

Ce regard succinct (et nous nous en excusons) sur une production intellectuelle si riche et diversifiée nous ramène à quelques questions qui nous animent en tant que sociologue : à travers les mutations sociales observées et décryptées par ces auteurs, assiste-t-on à une modification structurelle de la capacité sociale des humains ? Loin d’avoir la prétention de répondre à cette question, nous proposons seulement de soulever quelques perspectives dont puissent se saisir les chercheurs qui développent, à la suite de Jean Gagnepain, la théorie de la médiation. Il s’agirait également, en arrière fond, de revenir aux critiques énoncées par Marcel Gauchet [18] : que peut-on dire, à partir de l’analyse du fonctionnement de la personne, de la configuration sociale historique dans laquelle nous nous trouvons ? En quoi le fonctionnement implicite de la personne, et plus largement de l’humain, nous permet-il d’éclairer le contexte explicite particulier dans lequel nous vivons ?

Il nous semble que trois perspectives générales pourraient être développées afin de faciliter le dialogue entre ces différentes approches théoriques : tout d’abord, reprendre les apports principaux de la théorie de la médiation pour poser un point de vue sur les propositions des autres courants de recherche, notamment en ce qui concerne la dissociation entre les différents plans de rationalité ; deuxièmement, il nous semble que les chercheurs issus de la théorie de la médiation, et notamment les sociologues, pourraient utilement s’intéresser au pôle performantiel, c’est-à-dire à la mise en acte concrète, phénoménale, de notre capacité d’histoire ; on pourrait sans doute, à la suite de J. Gagnepain, s’intéresser davantage à la question des visées, et à la façon dont se polarise la dialectique ethnico-politique dans différents contextes historiques. Enfin, troisième perspective possible, on pourrait utilement développer des recherches et des échanges scientifiques sur ce qu’on peut appeler, au sens médiationniste, les interactions entre le plan de la personne et le plan de la norme.

Que peut-on dire de cette prétendue mutation anthropologique, au regard de la théorie de la médiation ? Concernant ce qu’on appelle souvent la postmodernité, nous ne sommes sans doute pas face à une « mutation anthropologique », au sens d’une altération de la constitution même de l’invariant anthropologique, ce qui impliquerait, dans une certaine mesure, « l’existence d’humanités successives, avec des différences profondes dans la manière de s’organiser et de se manifester du genre humain  [19] ». Nous serions plutôt dans la continuité de ce qu’est la raison sociale de l’homme, c’est-à-dire une capacité à être ensemble mais toujours différents les uns des autres, et en même temps une capacité à être toujours autre que ce que nous sommes, du fait de notre capacité sociale, capacité d’analyse de ce que nous sommes qui fonctionne dialectiquement en permanence. Capacité d’histoire, de création de soi qui est au cœur de l’humanité, de façon structurelle. Cette capacité à poser l’autre, à créer en permanence de l’altérité, serait une constante anthropologique, même si historiquement, nous avons commencé par poser l’autre en dehors de nous-mêmes (les esprits, Dieu…), alors que désormais nous le posons en nous-mêmes ; ce pour quoi Gauchet parle d’un passage de l’hétéronomie à l’autonomie.

D’autre part, alors que la plupart des auteurs de référence tendent à confondre différents registres de causalité, l’approche de Gagnepain permet de dissocier les différentes capacités rationnelles. La notion de réflexivité pourrait ainsi être précisée : elle concerne, d’une part, le plan de la logique en ce qu’elle concerne la maîtrise de l’information, la connaissance du monde, et le développement des sciences sociales (Giddens) ; d’autre part, elle est sociale, en ce qu’elle concerne la capacité de l’homme à être en regard de soi-même, à s’analyser, à prendre de la distance à l’égard de son vécu social et de soi-même ; enfin, elle est éthique en ce qu’elle concerne notre capacité de choix et d’expression de nos désirs et de notre liberté. De même, les approches contemporaines confondent le plus souvent le registre social — celui de la relation à l’autre et des pratiques sociales — et le registre idéologique — qui valoriserait l’individualisme —, alors que Gagnepain nous invite à penser le social en dehors de l’éthique, et vice-versa. On devrait alors dissocier ce qui relève de notre analyse éthico-morale et les formes historiques que peut prendre telle ou telle idéologie. C’est sans doute la principale difficulté que l’on trouvera à lire Lipovetsky, qui associe constamment le processus de personnalisation (narcissisme) et les comportements éthiques (hédonisme).

Enfin, la théorie de la personne nous permet également de dissocier les deux faces de la personne, identité et responsabilité, et d’en interroger les interactions : on peut observer qu’il y a convergence et réciprocité, dans la plupart des sociétés, entre le statut des personnes (leur identité, qui ils sont au regard de leur genre, de leur âge, de leur appartenance sociale) et leur rôle (leur responsabilité et leur contribution sociale). Nous pourrions faire l’hypothèse que pour la nôtre, il existerait, d’une part, un déficit de contribution sociale (affaiblissement du contrat, allongement de la jeunesse et de la vie « inactive », apparition massive du chômage et des « plans sociaux »…) et, d’autre part, un surinvestissement dans la singularité identitaire (quête et réinvention perpétuelle de soi, mobilité professionnelle, matrimoniale, géographique, résidentielle etc).

Que peut-on dire des phénomènes sociaux observables — le pôle performantiel – avec la théorie de la médiation ? Ainsi que le reconnaît Jean-Claude Quentel, « ceux qui se reconnaissent dans la théorie de la médiation sont souvent plus à l’aise (…) pour traiter du pôle « instanciel », implicite, de l’humain que pour analyser le moment « performantiel », celui-là même qui répond au réinvestissement de l’instance. Pourtant, il n’est pas possible d’en rester à l’instance fondatrice et quel que soit l’objet d’étude qu’elle se donne, l’analyse se situe toujours en même temps dans le « performantiel [20] ». Il s’agit dès lors, dans la suite de Gauchet, d’articuler le politique – en tant que principe – et la politique — au sens de mise en œuvre historique.

On pourrait mettre en débat, suivant en cela Gagnepain, l’idée selon laquelle le mouvement dialectique de la capacité sociale accentue, à des moments donnés, l’un ou l’autre pôle de la dialectique ethnico-politique. L’histoire humaine oscillerait entre la singularité (prise de distance avec le monde, c’est-à-dire mobilité et ubiquité, volonté de maîtrise du temps, repli et quête identitaire, décontractualisation et réforme) et la politisa­tion (présence au monde, convergence vers et avec l’autre, engagements réciproques, création de traditions). Notre société serait à un moment de forte singularisation (affranchissement progressif de nos contraintes et limites corporelles, déni de la mort, course après le temps, développe­ment du transport, affranchissement des structures familiales et « invention de soi », forte réflexivité, crise du contrat, repli sur la sphère privée), en tension avec une tendance politique affaiblie : le village planétaire, la nécessité d’être toujours connecté pour se définir soi-même, l’affaiblissement de la frontière entre privé et public, le militan­tisme et les communautés électives, le regroupement festif sur l’espace public. On doit noter toutefois qu’il n’y a pas, en la matière, d’exclusive, et que peuvent coexister des formes « d’hyper singularité autolytique » et des formes de « désindividuation fusionnelle ».

C’est sans doute ce que développe également Jean-Luc Brackelaire, qui évoque une « tendance dominante, non exclusive, qui opère par l’accentuation du pôle instanciel de sa dialectique, pôle que Gagnepain appelle ethnique et qui désigne l’analyse implicite par où les êtres humains ne cessent de s’absenter de leurs conditions naturelles en définissant formellement leur être et leur devoir en termes d’identité et de responsabilité, par divergence, par rapport à l’Autre et l’Autrui ». Plus loin on lira que « la modernité met en son centre le principe de cette auto-formalisation. Poussés à l’extrême, les risques pour l’homme, inhérents autant que conséquents, sont doubles : ils résident d’une part dans le désancrage, c’est-à-dire dans le fait d’être coupé des lieux, des temps et des gens qui font son environnement, son monde naturel et culturel, un risque donc de délocalisation, de déshistorisation, de désaffiliation et de désalliance. Et d’autre part dans l’incapacité, ou plutôt la difficulté, autolytique, de réinvestir dans une vie proprement sociale, c’est-à-dire avec les autres, partageable et partagée, dans les limites des places respectives, la pure altérité à laquelle chacun aspire, autrement dit la totale singularité par où l’on se coupe simultanément de soi-même et d’autrui. » [21]

Que peut-on dire des interactions entre la capacité à faire société, d’une part, et la capacité à réglementer nos désirs, d’autre part, à partir du modèle de la médiation ? Non qu’il faille revenir sur la dissociation attestée entre ces deux modalités rationnelles, apport majeur de ce modèle théorique, mais il importerait d’approfondir la façon dont les humains, individuellement et collectivement, codifient le légitime, socialisent leur capacité de norme, et fondent ainsi leurs lois et leurs usages sur leur autre capacité à réglementer leurs désirs. Car, bien que ces deux capacités rationnelles aient chacune leur logique propre, on se doit d’observer des phénomènes humains où ces deux registres de la rationalité sont performantiellement liés et chacun en question. C’est d’ailleurs ce lien qui anime les travaux de Lipovetsky, Maffesoli ou Erhenberg. Il serait à ce titre intéressant de développer des travaux autour de la notion d’hégétique proposée par Gagnepain, au sens de théorie du gouvernement, modalité de légalisation du légitime. On pourrait tenir l’hypothèse d’un « déficit de codifications sociales », d’une « difficulté à légaliser le légitime actuellement », qui pourrait d’ailleurs s’éprouver de deux manières contradictoires. En effet, certains chercheurs observent un déficit de restriction (Jean-Pierre Lebrun [22], Christopher Lash [23], Bernard Stiegler [24]), ce qui nous renvoie à l’hédonisme de Lipovetsky, aux communautés émotionnelles de Maffesoli ; on s’inscrirait aujourd’hui dans une société du plaisir, inverse de la société victorienne dont parlait Gagnepain à propos de la période freudienne où régnaient les névroses. D’autres chercheurs, inversement, s’intéressent au règne de la précaution, de la morale hygiéniste concernant la sexualité, le tabac, l’alcool, l’environnement… Quoi qu’il en soit, la recherche autour de la théorie de la médiation trouverait toute légitimité à clarifier les différents registres, de la sociologie et de l’axiologie, et à travailler sur leurs interactions dans leur mise en œuvre performantielle.

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Notes

[1M. Gauchet , J.-C. Quentel (sous la dir.), Histoire du sujet et théorie de la personne. La rencontre Marcel Gauchet Jean Gagnepain, Rennes, PUR, 2009.

[2Ibid., p 240.

[3F. de Singly, L’individualisme est un humanisme, Paris, Éditions de l’Aube, 2005.

[4J.-C. Kaufmann, L’invention de soi, une théorie de l’identité, Paris, Armand Colin, 2004.

[5A. Blair et A. Giddens, La Troisième Voie, le renouveau de la social-démocratie, Paris, Seuil, 2002.

[6A. Giddens, Les conséquences de la modernité, Paris, L’Harmattan, 1994.

[7U. Beck, La société du risque. Sur la voie d’une autre modernité, Paris, Aubier, 2001.

[8Voir l’article de X. Molénat, « Sommes nous entrés dans une nouvelle modernité », in Molénat, X., L’individu contemporain, regards sociologiques, éditions sciences humaines, 2006 ; il cite notamment un article beaucoup plus critique de L. Wacquant, « Au chevet de la modernité : le diagnostic du docteur Giddens », Cahiers internationaux de sociologie, Vol XCIII, déc 1993.

[9B. Lahire, L’homme pluriel, les ressorts de l’action, Paris, Nathan, 1998.

[10A. Ehrenberg, La fatigue d’être soi ; dépression et société, Odile Jacob, 1998.

[11G. Lipovetsky, L’ère du vide. Essai sur l’individualisme contemporain, Paris, Gallimard, 1983 et L’Empire de l’éphémère. La mode et son destin dans les sociétés modernes, Paris, Gallimard, 1987.

[12D. Bell, Les contradictions culturelles du capitalisme, trad. M. Matignon, PUF, 1979.

[13Voir à ce sujet G. Lipovetsky, Le crépuscule du devoir. L’éthique indolore des nouveaux temps démocratiques, Paris, Gallimard, 1992.

[14R. Castel, Les métamorphoses de la question sociale, Fayard, 1995.

[15Voir notamment M. Freitag, Dialectique et société, vol. 2, Culture, Pouvoir, Contrôle. Les modes formels de reproduction de la société, Bibliothèque Nationale du Québec, Montréal, 1986.

[16F. Dubet, Le déclin de l’institution, Seuil, 2002.

[17F. Dubet, « Les épreuves de l’individu », in Molénat, X., L’individu contemporain, regards sociologiques, Éditions sciences humaines, 2006.

[18Voir notamment, M. Gauchet, « De la personne à l’être ensemble », in M. Gauchet, J.-C. Quentel (sous la dir.), Histoire du sujet et théorie de la personne, op. cit., pp.239-243.

[19M. Gauchet, « Vers une mutation anthropologique ? », in N. Aubert, L’individu hypermoderne, Erès, 2004.

[20J.-C. Quentel, « Marcel Gauchet et la médiation. Une même préoccupation anthropologique », in M. Gauchet, J.-C. Quentel (sous la dir.), Histoire du sujet et théorie de la personne, op. cit., pp.58-59.

[21J.-L. Brackelaire, « La personne en suspens. Singularisme moderne et courts-circuits dans la transmission », in M. Gauchet , J.-C. Quentel (sous la dir.), Histoire du sujet et théorie de la personne, op. cit., pp. 125-126.

[22Cf par exemple ses entretiens avec Charles Melman, L’homme sans gravité, Paris, Denoël, 2002.

[23Ch. Lasch, La culture du narcissisme, 1979.

[24B. Stiegler, Prendre soin de la jeunesse et des générations, Paris, Flammarion, 2008.


Pour citer l'article

Christophe Moreau« Sociologies de la post modernité et théorie de la personne », in Tétralogiques, N°18, Faire, défaire, refaire le monde. Langage, technique, société (2010).

URL : https://tetralogiques.fr/spip.php?article114